jeudi 6 février 2014

La conductrice regardait son téléphone portable, pas la route

J’ai vu l’écran de mon portable s’allumer entre mes jambes, j’ai baissé la tête… » Dans un souffle quasiment inaudible, la jeune femme vacille à la barre. Elle doit répondre d’un accident mortel, qui s'était produit à hauteur de la commune de Ruy-Montceau, près de Bourgoin-Jallieu, dans lequel l’une de ses passagères et amie a perdu la vie. Marie Caruso n’avait que 22 ans.
Cette nuit du 7 au 8 décembre dernier, un groupe de six amis de Chambéry avait décidé de la poursuivre à la Fête des Lumières à Lyon. C’est Hasna, 22 ans, qui prend le volant du Renault Espace paternel. Les six jeunes s’engouffrent dans l’habitacle, qui ne dispose que de cinq places. Vers une heure du matin, alors qu’elle circule sur la voie de gauche, la jeune femme perd le contrôle du monospace, qui percute violemment le parapet central en béton, effectue des tonneaux, avant de s’immobiliser.

“L’épisode désagréable” du mensonge

Dans sa folle course, deux passagères sont éjectées. L’une est décédée sur le coup, la seconde est depuis hospitalisée dans un centre de rééducation. « Par réflexe de survie, j’ai rampé sur le goudron jusqu’à la voiture, puis jusqu’au parapet pour me mettre à l’abri », racontera cette dernière, malgré un poumon perforé et une fracture du bassin.
Avant d’aborder le chapitre des responsabilités, la présidente d’audience a tenu à revenir sur “l’épisode désagréable” du mensonge : celui de demander à une passagère d’endosser son rôle de conductrice. « Les investigations des enquêteurs ont permis de rétablir la réalité, grâce aux déclarations des autres passagers, au sang retrouvé, à l’exploitation des vidéos. Cela les a beaucoup monopolisés », insiste la magistrate. « Une manière de tuer une deuxième fois la victime ! », tonne le procureur de la République.
Celle qui avait fini par avouer aux gendarmes qu’elle avait agi ainsi par peur d’une colère paternelle, tente à la barre : « J’étais paniquée, j’étais traumatisée… Ce n’était pas possible que ce soit moi qui ai fait cela… »

“Un manque d’attention évident”

Ce soir-là, donc, les six amis étaient partis de Chambéry. Après avoir ingurgité plusieurs vodka orange. De la vodka qui continuera à circuler dans un gobelet dans la voiture. D’ailleurs, un taux de 0,26 gramme d’alcool sera retrouvé dans le sang de la conductrice, à 3 h 55 du matin, soit trois heures après l’accident.
Et surtout, l’enquête démontre “un manque d’attention évident” de la conductrice. « Des inconséquences qui ont conduit à la mort de Marie, martèle l’avocate de la famille de la victime. Votre téléphone portable a sonné à de multiples reprises. Entre 0h50 et 1 heure et 10 secondes, les enquêteurs ont relevé trois appels entrants, un appel émis, deux SMS reçus ! Le téléphone au volant est une déviance très courante, mais source de perturbations extrêmement importantes. Avec parfois des conséquences irréversibles. »
Tremblante sur sa chaise, car incapable de se tenir debout, la jeune femme acquiesce. « Quelques secondes avant l’accident, l’une de vos passagères vous a pourtant mise en garde. Quand on conduit, on ne peut que conduire ! », assène la présidente. Des larmes coulent sur les joues d’une prévenue. « Ma cliente assume la responsabilité de la mort de son amie. Pas un jour ne passe sans qu’elle ne revive ce drame », assure l’avocate de la prévenue.
Alors que le procureur a requis 18 mois de sursis, le tribunal a finalement condamné à 15 mois de sursis la conductrice. Son permis a été annulé, avec interdiction de le repasser d’ici un an.

http://www.ledauphine.com/isere-nord/2014/02/05/la-conductrice-regardait-son-telephone-pas-la-route

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